L’événement a surpris plus d’un. Au petit matin du samedi, 4 novembre 2023, un commando de « six (6) hommes » lourdement armés dit-on a fait irruption à la maison centrale de Conakry, l’une des plus grandes et sécurisées prisons du pays. Conséquence, le commando a réussi à extirper de la prison des anciens cadres du Conseil National pour la Démocratie et le Développement (CNDD) à savoir : le capitaine Moussa Dadis Camara, les colonels Moussa Tiegboro Camara, Claude Pivi et Blaise Goumou. Et depuis, commence alors une chasse aux sorcières dans un combat dont l’essentiel s’est déroulé à Samatran, dans la préfecture de Dubreka. Quelques heures après, trois des fugitifs ont été repris et conduits à nouveau en prison. La question que bon nombre d’observateurs se posent, est comment cela a-t-il été possible ?
D’entrée, il faut rappeler que la junte guinéenne tient mordicus qu’il s’agit d’une « évasion » et non d’un « enlèvement » comme le prétendent les avocats des fugitifs. Comment comprendre qu’un commando de « six (6) hommes » ait pu mettre au respect des éléments des forces de défense et de sécurité guinéennes ? Impossible de répondre, mais toujours est-il qu’il existe tout un dispositif sécuritaire à l’entrée de Kaloum, siège de l’administration guinéenne et du palais présidentiel. Depuis le coup d’État du 5 septembre 2021, des militaires sont postés au niveau du pont 8 novembre. Sur la corniche, à côté du palais du peuple, se trouve également la base des forces spéciales. Si le commando était appuyé par un bataillon de 200 hommes, qu’est-ce qui allait se passer ?
A date, l’on ne connait pas encore l’identité des membres du commando, même si le nom du fils de l’un des fugitifs toujours introuvables, est cité dans cette opération digne d’un film hollywoodien. Autre fait à ne pas négliger dans cette attaque de la maison centrale de Conakry, est que c’est le capitaine Moussa Dadis Camara, les colonels Moussa Tiegboro et Blaise Goumou, par le biais de leurs avocats, qui ont donné leur position, dit-on. Ce qui a donc permis de les reprendre pour les conduire à nouveau à la maison centrale de Conakry, à en croire leurs avocats. S’ils n’avaient pas donné leur position, les services de sécurité seraient-ils en mesure de les arrêter aujourd’hui ? La réponse peut être négative, dans la mesure où le colonel Claude Pivi est toujours introuvable et demanderait des garanties pour se rendre.
Dans les déclarations des autorités ces dernières soixante-douze heures, l’on est en mesure de relever un certain nombre de choses qui donnent à réfléchir. D’abord, le ministre de la Justice qui a été la première autorité à s’exprimer sur ce fait, a laissé entendre que les gardes pénitentiaires ont besoin d’appui de la part des services de sécurité pour sécuriser la maison centrale de Conakry. Or, la maison centrale de Conakry doit être surveillée nuit et jour en raison du fait qu’elle sert de local pour les accusés dans le procès des tueries du 28 septembre 2009. Officiellement, avec un bilan de 9 morts et de 6 blessés, plusieurs questions restent en suspens sur l’efficacité du système de sécurité du pays. A l’issue de l’événement du samedi, certains éléments des forces de défense et de sécurité sont souvent sifflés par des citoyens dans la circulation. Une attitude qui démontre sans nul doute de multiples questions que la plupart des citoyens se posent dorénavant quant à la capacité des forces de défense à anticiper une telle attaque et se défendre comme ça se doit.
Mohamed Lamine Souaré, journaliste