Congrès de l’UFR: voici l’intégralité du discours du Président Sidya Touré
Chers militantes et militants, c
Chers membres du Bureau exécutif national,
Chers invités,
Chers amis de la démocratie, à la République des Guinées, c’est vraiment avec une profonde émotion que je m’adresse à vous aujourd’hui depuis l’extérieur de notre pays, dans un contexte particulier, douloureux, mais aussi peut-être porteur d’espoir. Oui, ce congrès extraordinaire se tient à un moment où notre parti, avec plus de 30 ans d’existence, dont pratiquement 25 ans de ma présidence, se trouve suspendu injustement, je dirais.
J’estime que cette décision témoigne de la fragilité démocratique dans laquelle notre pays semble à nouveau s’engouffrer. Mais votre présence aujourd’hui, j’ai écouté toutes les délégations de différentes régions, ça fait un bon moqueur, mais ça fait comprendre aussi que l’UFR n’est pas un simple parti politique. L’UFR, c’est une conviction. L’UFR, c’est un espoir pour la Guinée.
Comme vous le savez, je suis entré en politique dans des conditions assez particulières, car à ma sortie de la primature, mais comment moi-même y suis entré, dans cette fameuse primature, après les événements du 2-3 février 1996, ils m’ont trouvé curieusement derrière à Conakry, je suis parti très rapidement. Et le 2 mai 1996, on m’appelle de Conakry pour me dire que le président Conté souhaitait me voir. Donc je suis allé à Conakry, et dès mon arrivée, le soir à 19h30, on m’a conduit au camp, où il était, au camp Samory Touré. Nous avons entamé une discussion qui a duré près de trois heures. Quand je dis discussion, ils posaient des questions et je répondais.
Ils étaient extrêmement préoccupés par ce qui était arrivé, et trois mois après cette tentative du 2-3 février, la situation du pays était devenue catastrophique. Il m’a dit, j’ai appris que vous avez contribué, avec votre ancien patron, à gérer un problème identique en Côte d’Ivoire. Est-ce que vous pensez qu’on peut faire autre chose ? Nous avons eu cette discussion le 2 ou le 3 mai. Cela a duré deux mois et demi avant que je ne sois nommé Premier ministre, et on a eu pratiquement six ou cinq rendez-vous tous les mois. Et tous les mois, c’est lui qui posait les questions et c’est moi qui répondais. Nous avons mis en place, donc à mon arrivée, un programme de développement économique pour la Guinée, dont tout le monde connaît le succès.
Le pays s’est redressé, nous avons renoué avec les institutions, nous avons relancé la Guinée. Mais tapis dans l’ombre des cadres guinéens se sont mis ensemble pour détruire tout ce qui se faisait. C’est quelque chose de très sérieux, j’en parlais avec l’un d’entre eux il n’y a pas longtemps.
Ils se sont attachés à détourner tout simplement pour pouvoir mettre la main sur les fonds publics. Et c’est ainsi que, petit à petit, le système s’est dévié complètement. Mais ils ont poursuivi ce travail, même quand moi j’ai quitté la premature.
Et c’est ainsi qu’en 2010, la majeure partie de ces cadres se sont retrouvés dans le même gouvernement qui était arrivé dans les conditions qu’on connaît. Et les mêmes provocations ont continué dans le secteur de l’énergie, dans le secteur de la bauxite. Comment vous pouvez imaginer qu’un pays a dépensé un milliard et demi de dollars pour construire deux barrages qui ne produisent pas d’électricité.
Dans le secteur de la bauxite, les quantités ont augmenté et l’argent a commencé à couler. Mais dans les proches des uns et des autres, nous avons continué à dénoncer cela. On l’a dénoncé et nous savons où est-ce que cela allait nous mettre.
Donc je suis arrivé en politique pour défendre les acquis économiques de notre pays. Je ne suis pas un homme politique normal, je n’ai pas créé un parti pour la conquête du pouvoir ou de tout cela. Je souhaitais voir mon pays évoluer à l’image de ceux que je connaissais par ailleurs.
Mais ces cadres véreux qui ont pris l’administration en otage et qui ont détruit le système sont restés. Et la Guinée est arrivée là où elle est arrivée. Ce qui nous a amené au prétendu troisième mandat.
J’ai refusé de participer à cela. Ce que beaucoup ne savent pas, le 16 octobre 2020, j’ai été l’objet d’une tentative de renseignement chez moi. A 4 heures du matin, avec cinq pick-up et une vingtaine de gendarmes et autres.
Curieusement, quand on avait bloqué mon passeport, certaines femmes républicaines ont décidé de venir s’installer dans la cour. Elles ont même appelé les jeunes. Donc, c’est les cieux qui sont venus pour m’enlever.
Ils se sont regroupés avec près de 200 militants, femmes, jeunes, qui ont empêché cela. Alors, vive les femmes républicaines ! Vive les jeunes républicains ! Sans vous, je ne serais pas là aujourd’hui, c’était la période Covid. Ça veut dire à quel point notre pays était destructuré.
Donc, avec l’appui du président Ghanien, qui était à l’époque président de la CEDEAO, j’ai pu sortir de la Guinée en novembre. Alors, vous pensez bien que quand les jeunes gens sont arrivés au pouvoir, on ne pouvait qu’applaudir ? Et mes amis de l’extérieur, qui m’ont dit « oui, mais vous avez applaudi un régime militaire ? » J’ai dit non. C’est dans quoi nous nous trouvions.
Nous avons pensé que les jeunes gens venaient pour nous sauver de cela. Et donc, oui, on a accueilli ça avec beaucoup d’espoir. Aujourd’hui, nous sommes dans une situation pratiquement de blocage.
Nous avons fait des tentatives à l’époque. Moi-même, je me suis encore retrouvé à l’extérieur après qu’on m’ait expulsé de ma maison. Et nous nous sommes retrouvés, mais la Guinée est toujours là.
Tout ce qui se fait aujourd’hui pose problème. Le manque de démocratie, la violence répétée. Et surtout aujourd’hui, quand vous regardez tout ce qui concerne la Guinée, qu’est-ce que vous entendez ? On a détourné ceci, on a volé cela.
C’est un vrai drame. Je sais, les efforts sont faits, mais ça ne va pas dans le bon sens. Alors, quelle est la solution ? Nous, nous n’avons pas d’armes.
La solution, c’est de dialoguer. Il faut que nous devions, nous l’avons dit en son temps, mais il faut que nous devions les moyens de nous retrouver pour discuter de la situation du pays. Cela, les dirigeants aujourd’hui devraient le comprendre.
Parce que c’est la seule solution. Il y a une telle tension dans notre pays. Il y a un besoin de trouver du travail pour les jeunes.
Il y a un besoin de créer de la richesse. Toutes ces choses-là ne peuvent pas se faire si nous n’arrivons pas à être ensemble, au moins pour un minimum de choses. On peut ne pas être d’accord sur tout.
Mais nous devons, pour que ce pays progresse, nous entendre sur un minimum. Et sur ce point-là, notre langage n’a jamais changé. Aucun développement durable ne peut se faire en excluant une partie de nos concitoyens.
C’est ensemble et dans l’union que les peuples bâtissent une action. C’est ensemble et nous construisons un état fort, une démocratie réelle, une économie dynamique et inclusive. Donc nous demandons que nous puissions nous retrouver sous quelque forme que ce soit. Mais que les discussions s’engagent. L’exclusion ne nous mènera à rien. Il faut qu’on trouve des solutions à cela. Il faut renforcer la confiance entre les gouvernants et les gouvernées et redonner à la Guinée une image qui lui permette de jouer son rôle dans le concert des nations. Si aujourd’hui on avait la possibilité d’exister, nous pourrions exposer énormément de choses. Malheureusement, ce n’est pas le cas.
Nous avons dénoncé la violence. Nous avons dénoncé un certain nombre de choses. Et c’est la raison pour laquelle nous rendons encore hommage à nos amis.
Foniké Menguè, Billo Bah, Habib Marouane et le jeune Aliou qui vient d’être condamné. Mon ancien secrétaire général de la jeunesse s’était croisé acquis en exil. Je ne vais pas pleurer sur mon propre critère.
Mais nous sommes tous attentifs à ce que nous pouvons faire. La démocratie est notre créneau. Les élections c’est notre créneau.
Mais comment y arriver si d’un côté il y a les militaires, de l’autre la société civile et les partis politiques. C’est le dialogue qui peut rassembler tout cela. Je souhaitais que nous prenions occasion, opportunité à ce congrès pour faire comprendre à l’armée qu’elle est une partie du peuple des Guinées et qu’il n’y a pas de raison.
Et je dis bien qu’il n’y a pas de raison. Que nous ne puissions discuter de cette situation pour aller de l’avant. Nous avons bricoté un certain nombre de choses avant.
Aujourd’hui il y a des projets qui sont en cours, la constitution, le revêtement. Honnêtement, nous ne sommes pas impliqués. Il n’y a pas de raison que les Guinées ne s’entendent pas sur les intérêts de la Guinée.
Chacun peut crier de son côté. A un moment donné, il faut que l’initiative soit prise pour que nous puissions avancer. Tantôt, j’ai écouté Abbas, lui qui a parlé pour le Grand Conakry.
Ce sont ses idées qu’il a développées et je suis parfaitement d’accord avec lui. Nous avons essayé un certain nombre de choses. Mais aucun d’entre vous ne porte les armes.
De toute façon, ça ne nous mènera nulle part. Comment fait-on pour renouer le capital ? Je crois qu’il appartient aux jeunes gens qui sont aujourd’hui au gouvernement, qui représentent l’armée, de prendre des initiatives pour qu’on sorte d’un blocage qui ne leur sert pas à eux-mêmes. Parce qu’eux-mêmes ont besoin de donner des résultats qui puissent permettre de comprendre qu’ils ont pris le pouvoir pour aller de l’avant.
C’est la paix, la tranquillité, l’Union Nationale qui permettra qu’on puisse avancer dans ce sens. Ce congrès est pour moi une occasion allureuse puisque je ne suis pas là. Mais à vous voir comme ça, je me rends compte que le parti reste dynamique.
Je me rends compte que les militants sont encore là et engagés. Je me rends compte que je les vois, les anciens, les vieux, les jeunes, je les vois. Je les vois d’ici.
Certains d’entre eux ont pris un coup de vieux. Notamment Faso Manigui et compagnie ont pris un coup. Même vice-président Baldé.
Tant que les femmes n’ont pas vieilli dans cette affaire. Il y en a même à Gaz, Sousala, Barbara, on n’en parle pas. Les femmes, elles ont rajeuni, c’est clair.
Donc, je voudrais dire que ce n’est pas un discours formel. Nous sommes à la recherche d’une solution pour notre pays. Jeter la natale sur les uns, sur les autres, je ne crois pas que ce soit la solution.
Mais, ce qui peut aujourd’hui engager une possibilité pour qu’on aille de l’avant et qu’on puisse se voir, c’est le CNRV. Il faut qu’ils fassent un effort dans ce sens. Déjà avec ceux qui sont là et peut-être après avec nous tous.
Mais si nous ne nous entendons pas, je ne vois pas comment est-ce que les résultats qu’Aguiné peut souhaiter peuvent être atteints pour faire en sorte qu’on puisse impliquer les citoyens, écouter leurs inspirations et agir en conséquence. Si je souhaitais aujourd’hui réellement prendre la parole à ce congrès, parce que les éléments essentiels vous les avez indiqués, en tant que président du parti, voyant cela de l’extérieur, voilà ce que je souhaitais. Nous avons applaudi, comme je disais à mes amis.
L’Aguiné avait complètement été détruite par des gens qui, heureusement, certains sont en prison. Mais cela n’a pas suffi parce que le mal était immense. C’était immense.
Nous devons pouvoir se parler. Sinon je peux dire non, non, on va crier, c’est pas la solution. On a essayé ça pendant trois ans à part.
On n’y est pas. Et nous, le temps commence à compter du coup. Il faut qu’on sache à quel moment les Guinéens, tous, emprunt, intériorisant que notre pays est nôtre et que nous souhaitons que les choses s’améliorent pour nos compatriotes, pour qu’on puisse intégrer tout cela et que, pourquoi pas, le fil du dialogue soit tendu.
Même au sein de l’apartheid en Afrique du Sud, ils ont dialogué. Le Sud, dans un pays où le chef disait que le dialogue n’est pas l’arme des faits, le dialogue c’est l’arme des forces. Parce que quand tu engages cela, c’est que tu sais les raisons pour lesquelles tu te fais.
Je vous demande de garder les structures du parti fonctionnelle. Je vous demande, et ça j’en ai eu la preuve aujourd’hui, les délégations sont toutes là, conserver ces possibilités-là. À un moment donné ou à un autre, les Guinéens devront se retrouver.
Il n’y a pas de solution autre que celle-là. Il n’y en a pas. Parce que je ne peux pas être opposé dos à dos et dire que nous sommes dans le même pays et que nous sommes en train de travailler pour un état d’ordre.
Donc mon message essentiel aujourd’hui c’est de rappeler, comme je l’ai dit, moi je ne suis pas un homme politique, je suis venu faire un travail promis. On l’a sabordé, c’est quand on l’a sabordé que je me suis dit, il faut que je dénonce pourquoi cela a été sabordé. Et c’est ainsi que le parti UFR qui existait, et qui était présidé par Garet Jadot et Duman Gui, m’ont fait appel pour me confier la présence du parti pour défendre les idéaux que j’avais exposés.
Il est difficile pour un peuple de se rendre libre et d’être épanoui si économiquement les choses ne vont pas. Et aujourd’hui en Guinée, sur le plan économique, je me rends compte que le gouvernement subit beaucoup de choses aujourd’hui. Les gens ne sont pas nés tous honnêtes.
L’organisation de l’état consiste à mettre en place les moyens qui évitent que des choses comme ça arrivent. C’est arrivé à un tel niveau que c’est devenu inquiétant. Que ce soit la bauxite, que ce soit l’or, que ce soit… C’est incroyable ce qu’il se passe.
C’est dans le cadre de la mise ensemble de nos capacités que nous pouvons éviter cela. Nous avons souhaité faire ce congrès, et j’en suis très heureux parce que j’ai revu beaucoup de gens que je n’avais pas vus pendant 5 ans, en vous disant que le travail continue, nous devons être la lumière qui indique le chemin au Guinée, pour dire voilà le chemin du développement économique. Pourquoi ? Parce qu’un jeune qui a faim n’est pas un homme libre.
Mon professeur d’économie, le premier temps il nous a dit, si on vous enseigne une économie qui ne donne pas du travail aux gens, qui ne soigne pas quand ils sont malades, qui ne trouve pas une maison pour eux, qui ne leur permet pas d’amener leurs enfants à l’école, il m’a dit il faut abandonner ça. Donc c’est à la base de bien-être, c’est à la base de tout cela. Nous avons toujours travaillé pour le bien-être des populations humaines.
Nous lançons un appel pour que ceux de l’autre côté puissent comprendre que ce qui n’a pas pu être fait, doit être fait. Les Guinées doivent se parler, les Guinées doivent pouvoir, sur un minimum de choses, pouvoir s’entendre. Alors le fait que vous soyez venus aujourd’hui des quatre coins de la Guinée pour manifester cela, me rend vraiment extrêmement heureux, parce que c’est un message que nous passons comme cela.
Alors de tout cœur, je vous dis vraiment merci d’être venus, merci d’avoir fait le déplacement, merci d’avoir tenu ce congrès et vive l’UFR!
Vive la jeunesse républicaine !
Vive les femmes républicaines ! Vive les femmes républicaines ! Et puis vraiment, vive la vie républicaine! Merci